Ils m’ont appelée Eva, de Joan M. Wolf

Même si je ne me souviens pas exactement de la source (désolée), c’est à nouveau la blogosphère qui m’a rendue curieuse de découvrir Ils m’ont appelée Eva, de Joan M. Wolf. De manière générale, les romans se concentrant sur cette sombre période de l’Histoire me rendent curieuse. J’ai parfois l’impression que les meilleures fictions ne peuvent rivaliser avec la réalité et la Seconde Guerre Mondiale est le matériaux le plus foisonnant possible en la matière, avec tant d’horreurs vécues mais aussi tant de leçons à en tirer.

Milada est une jeune fille ayant été élevée par une famille aimante en Tchécoslovaquie aux premières heures de la Seconde Guerre Mondiale. Une nuit fatale va voir sa vie bouleversée : des rafles de soldats nazis détruisent son village natal. La fillette, aux cheveux blonds et aux yeux bleus, est alors séparée de sa famille alors qu’elle n’a que 8 ans. Elle va rejoindre de force un programme de formation destinée à faire d’elle la parfaite jeune femme aryenne, futur de la nation allemande selon ses ravisseurs.

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La fiction au service du devoir de mémoire

Ils m’ont appelé Eva est une fiction inspirée de faits réels. C’est une nuance importante car, en temps que roman fictionnelle, il n’a pas vocation à être parfaitement réel mais à délivrer un message. Les éléments de l’intrigue sont donc construits autour de ce que l’autrice veut montrer : à savoir la condition des jeunes filles aryennes entraînée dans le programme nazi pour la jeunesse allemande. On sent une volonté de Joan M. Wolf d’être pédagogue, de montrer sans choquer et de sensibiliser un jeune public, destinataire principal de cette œuvre, à l’endoctrinement qui a pu être mené par l’Allemagne durant la Seconde Guerre Mondiale. Pour cela, elle adopte un point de vue omniscient qui permet une véritable empathie pour sa jeune héroïne, tiraillée entre son identité de naissance et celle créée par les allemands qui l’envahi peu à peu. Inspiré de faits réels, donc, le roman est très bien documenté, fait preuve de rigueur pour ne pas trop s’éloigner de la réalité historique mais présente ce point de vue très original qui décide de ne se consacrer qu’à un tout petit fragment de la réalité de l’époque.

En effet, la vision reste parcellaire et mériterait sans doute d’être complétée par d’autres lectures du même genre. A titre d’exemple, je le trouve très complémentaire avec Max de Sarah Cohen-Scali, qui adopte le point de vue d’un jeune garçon du programme lebensborn. Mais d’autres points de vue sont aussi possibles : Maus d’Art Spiegelman pour un regard sur la réalité de la vie dans les camps ; La Mort est mon métier de Robert Merle pour un point de vue sur les motivations des officier allemands (attention, ce dernier est destiné à un public plus adulte)… Le roman est un bon début pour sensibiliser les plus jeunes (à partir du niveau collège, selon moi) sans les choquer. Le propos reste dans le sous-entendu, il évoque sans dire complètement et permet de comprendre une partie des horreurs qui ont pu se passer sans les montrer de façon trop choquante. Néanmoins, pour être pleinement compris par un jeune lecteur, la lecture mérite sans doute d’être accompagnée par un adulte capable d’expliciter certaines scènes qui pourraient ne pas être pleinement comprises autrement.

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Le mot de la fin

Ils m’ont appelée Eva est un roman simple d’accès qui donne une vision de ce qu’ont pu vivre certaines familles lors de la Seconde Guerre Mondiale. L’histoire est prenante, construite autour de cette jeune fille qui perd peu à peu son identité au profit de celle qu’on cherche à lui imposer. Elle ne cède pas aux sirènes du manichéisme facile, ce qui rend cette fiction d’autant plus réaliste et sujet à réflexions. Une lecture poignante, éclairante et cruciale pour apprendre du passé.

Une réflexion sur “Ils m’ont appelée Eva, de Joan M. Wolf

  1. Voilà un roman que j’ai très envie de découvrir !
    Je partage ton sentiment. J’ai l’impression que tout ce qu’on pourra écrire sur la Seconde Guerre mondiale, ne pourra jamais totalement reflété l’intégralité de cette période complexe, où le plus beau à rencontrer le pire de l’humanité.

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