Découvrons… Colomba, de Prosper Mérimée

Malgré sa popularité, j’avoue avoir connu des hauts et des bas avec Mérimée. En effet, collégienne, on m’avait fait lire sa très célèbre nouvelle La Vénus d’Ille, à laquelle je n’avais pas du tout accroché – le côté ésotérique, avec cette fin irrésolue m’avait énormément frustrée ; j’aime savoir ! -, ce qui m’a longtemps dégoûtée de vouloir retenter l’expérience avec cet auteur. Cependant, l’année dernière, j’ai voulu lui laisser une seconde chance et grand bien m’en pris : j’ai lu Carmen et j’ai adoré ! Alors que penser de cet auteur qui m’avait à la fois beaucoup déçue et totalement charmée ? Pour le savoir, j’ai tenté la lecture d’une troisième nouvelle de l’auteur, qui va nous intéresser ici : Colomba. Finalement, cette dernière lecture me laisse bien embêtée. En effet, j’ai adoré l’histoire, dévoré cette petite nouvelle, je me suis beaucoup attachée à Ors’Anton dont j’ai compris le dilemme et pourtant, le personnage éponyme, cette fameuse Colomba, m’a totalement laissée froide. Bornée, irraisonnée et antipathique au possible, elle est bien loin de cette Carmen qui m’avait tant charmée.

Un lieutenant français, Ors’ Anton – Orso della Rebbia, de son nom complet -, rejoint sa Corse natale où il rencontre un colonel Nevil et sa fille Miss Lydia en vacances, jeune fille dont il s’éprend bien vite. Cependant, Ors’ Anton a un souci : son père est mort et sa sœur, Colomba, est persuadé qu’il a été assassiné par une famille ennemie de la leur, les Barriccini. Colomba réclame alors vengeance : seule la fameuse vendetta corse pourra réparer l’ignominie qui pèse sur leur père. Pris entre tradition ancestrale et éducation moderne, Ors’ Anton doit faire un choix.

Ligne horizontaleMœurs & tiraillements.

Mérimée était fin connaisseur de la Corse et cela se ressent immédiatement dans cette longue nouvelle qu’il a composée. En effet, la couleur locale est extrêmement bien représentée, on a presque l’impression de lire un récit de voyage alors même qu’on ne sort pas des frontières françaises et on découvre une véritable culture à part, qui forme des êtres aux caractères bien trempés. Cet impérieux désire de vengeance qu’incarne Colomba exprime toute la fougue de la nature Corse – telle qu’elle est représentée dans ce livre, à cette époque, je ne saurais dire ce qu’il en est aujourd’hui, précisons ! – ; sauvage et fière, elle ne peut tolérer l’insulte et n’a de cesse de réclamer la vendetta que lui refuse son frère. On a affaire à des mœurs totalement différentes de celles que l’on connaît, qui estiment la vengeance plus légitime que la loi, qui rendent les bandits aimables car pétris de morale et motivations par des intentions estimées bonnes, qui fait passer l’honneur familial au-dessus de toute valeur.

D’origine corse, Ors’ Anton a donc été éduqué selon ces mœurs particulières typiques de l’île et ressent le besoin de répondre à son instinct qui lui dicte d’agir comme ses ancêtres l’ont toujours fait mais, après une éducation militaire passée sur le continent français, Ors’ Anton est également devenu fervent défenseur de l’ordre et de l’autorité, respectueux de la loi et s’opposant à la sauvagerie de la vendetta corse. C’est – pour moi, en tout cas – vraiment ce qui fait alors tout l’intérêt de ce roman : ce tiraillement que ressent le personnage d’Ors’ Anton, coincé entre deux partis différents représentés par les deux femmes de sa vie, sa sœur Colomba qui ne tolère aucun échappatoire est la gardienne des traditions tandis que Miss Lydia, son amante – dans le sens de « femme aimée », rien de plus, bande de coquinous ! -, prône le respect de la justice moderne. Ce jeune homme, ainsi partagé entre deux patries, deux éducations, deux amours est le véritable cœur de l’histoire et n’a pas le choix de devoir trouver une alternative pour concilier ces valeurs opposées en lesquelles il croit pourtant tout autant.

Ligne horizontaleEn bref :

Malgré mon antipathie pour le personnage éponyme de cette nouvelle, j’ai vraiment aimé Colomba pour la sincérité de ses autres personnages et surtout pour l’authenticité de la culture représentée. Bien que différentes des nôtres, on finit par comprendre les motivations de ces personnages et par les apprécier inévitablement. De plus, la réelle touche qu’a su apporter Mérimée à ce peuple, si bien dépeint qu’on a l’impression de le connaître dans sa plus grande intimité. Donc, même si comme moi vous n’avez pas accroché à certains récits de Mérimée, n’hésitez pas à retenter votre chance avec un autre livre : la diversité de ton de ses nouvelles vous surprendra sans doute !

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