Aujourd’hui, chers lecteurs, je vous propose de parler un peu de la trilogie qui m’a tout d’abord fait aimer la fantasy : La Quête d’Ewilan de Pierre Bottero. Je ne recommanderais certes pas ces romans à un lecteur adulte aguerri en fantasy car ils présentent un certain nombre de lieux communs qui pourraient vite le lasser mais pour une découverte du genre, ces livres étaient les meilleurs dont je pouvais rêver et je les relis encore régulièrement – entre celle-ci et la trilogie suivante, Les Mondes d’Ewilan, j’ai bien dû lire chaque livre une vingtaine de fois au bas mot ! – et ce toujours avec le même plaisir. C’est incroyablement bien écrit, touchant, plein d’action et de philosophie alors comment résister ? Si je devais avoir une madeleine de Proust, aucun doute que ce serait celle-ci ; c’est pourquoi j’ai envie de partager aujourd’hui avec vous ce que ces livres m’ont appris.
L’histoire, quand à elle, est aussi simple qu’enthousiasmante. Camille Duciel est une jeune fille particulièrement intelligente mais aussi extrêmement seule ; adoptée par de riches parents qui ne lui portent guère d’égards, son unique ami est Salim, un garçon des cités plein de panache qui ressent le même manque affectif que la jeune fille et décèle son extraordinaire potentiel. En effet, un jour Camille se découvre un talent incroyable : ce qu’elle imagine dans sa tête, si elle l’y peint avec les couleurs de la réalité, peut devenir réel. Plus encore, elle découvre qu’elle ne s’appelle pas Camille mais Ewilan Gil’Sayan et qu’elle vient d’un autre pays dans lequel évoluent d’autres Dessinateurs comme elle : Gwendalavir. Elle y entraîne Salim, y rencontre de précieux amis et se met en quête des plus grands dessinateurs que le pays ait connu, parmi lesquels figurent ses propres parents dont elle ne conserve aucun souvenir. Eux seuls semblent pouvoir sauver Gwendalavir du terrible danger qui les menace tous.
Dessin & équilibre.
L’Art du Dessin est la magie qui est pratiquée à Gwendalavir ; elle permet a quiconque possédant le Don de créer dans la réalité ce qu’il a imaginé. On a donc là un formidable pouvoir qui repose entièrement sur l’imagination de son utilisateur dont Pierre Bottero fait ainsi une belle apologie. Quand on y pense, le postulat de départ est très semblable à celui de Matilda de Roald Dahl : une jeune fille d’une intelligence extraordinaire, délaissée par ses parents, passe son temps à lire jusqu’au jour où elle se découvre un pouvoir mental qui lui permet de reprendre son destin en main. Ainsi, je pense qu’il y a une morale commune aux deux livres : l’esprit est une force qu’il ne faut pas dédaigner. Cependant, je pense que Bottero apporte une nuance non négligeable puisque ce n’est plus seulement l’intelligence mais l’imagination qui est au cœur de cette magie. On est toujours très lié à l’univers de la lecture puisque lire développe et l’intelligence et l’imagination mais on est moins sectaire en ce que l’intelligence est question de facultés et d’éducation tandis que l’imagination peut être développée par tout un chacun à condition de s’en donner les moyens. C’est d’ailleurs très bien illustré par le personnage de Salim : lui-même n’est pas Dessinateur, il ne possède, a priori, aucun don particulier et pourtant, son destin change en même temps que celui d’Ewilan simplement parce qu’il croit en elle, parce que son esprit n’est pas fermé aux facultés étonnantes de la jeune fille contrairement au reste de leur entourage.
Néanmoins, ce pouvoir, comme il se doit, s’accompagne de certaines limites. En effet, pour conserver une forme d’équilibre entre les lois de la nature et la magie, tout ne peut être permis à tous les Dessinateurs. La plupart du temps, les objets créés par le Dessin ne durent pas dans le temps et l’autre pouvoir des Dessinateurs, celui de « faire un pas sur le côté », c’est-à-dire se déplacer instantanément d’un lieu à l’autre, ne fonctionne que pour les lieux que le Dessinateur a déjà vu. Seuls quelques Dessinateurs d’exception, au Don plus développé, sont capables de s’affranchir de ces règles en créant, par exemple, des objets éternels ou encore en faisant le « Grand Pas » les menant d’un monde à l’autre. Or, le Don de chaque Dessinateur dépend de trois forces : l’Imagination, la Volonté et le Pouvoir ; plus celles-ci sont présentes de façon équilibrée, plus le Don sera puissant et inversement, si l’une de ces forces est surreprésentée ou sous-représentée par rapport aux autres, ce déséquilibre entraînera un affaiblissement du Don. On voit donc que l’univers de Pierre Bottero est très fortement marqué par un besoin d’équilibre : de grandes puissances sont en présence mais elles doivent toujours être contrebalancées pour ne pas être l’instrument d’abus, pour ne pas verser dans l’excès et pour instaurer une certaine forme d’harmonie dans l’univers imaginaire.

Quête & manichéisme.
Dans une trilogie nommée La Quête d’Ewilan, il est bien peu surprenant que le motif de la quête soit l’un des plus importants. Ainsi, l’objectif principal d’Ewilan et de ses compagnons de route va être de se mettre en quête de ceux qui pourront sauver Gwendalavir : les Sentinelles, ces Dessinateurs extrêmement puissants chargés de protéger le pays mais retenus prisonniers. Dans cette quête, digne des romans médiévaux du cycle arthurien, Ewilan va même recevoir l’aide d’une voix mystérieuse résonnant dans sa tête pour la guider telle la Dame du Lac guidant le roi Arthur. On retrouve donc, outre le monde médiéval peuplé de châteaux et chevaliers propre à de nombreux ouvrages de fantasy, tout un imaginaire issu en ligne directe de la littérature médiévale. Cependant, si les chevaliers arthuriens sont en quête du Graal, ce n’est pas un objet mais des personnes que recherche Ewilan, parmi lesquels figurent ses parents. La quête faite au nom du royaume devient ici quête personnelle : elle est la quête d’une famille qui va s’illustrer aussi bien dans le but que dans le chemin qui l’y conduit. En effet, en chemin Ewlian développe ses pouvoirs qui lui permettront d’aider à sauver le royaume aussi bien que les Sentinelles et elle rencontre de nombreux compagnons qui vont former, autour d’elle, une famille aussi fortement liée qu’avec n’importe quels liens du sang.
Ewilan fait de nombreuses rencontres en cours de route ; elle se constitue, comme toute bonne héroïne de fantasy, un groupe d’aventuriers qui vont l’accompagner dans sa quête et croise, parfois, des méchants – auxquels ils dérouillent allègrement la face ! – mais la confusion entre les deux n’est absolument pas possible. En effet, La Quête d’Ewilan présente un univers très manichéen dans lequel les bons sont des héros absolus capables de prouesses extraordinaires et dénués de vices – à peine quelques défauts pour les rendre plus humains mais rien de bien dommageable pour leurs grandes vertus – et les mauvais sont des créatures difformes, effrayantes, qui n’ont aucun scrupule à tuer et que l’on n’a donc aucun scrupule à voir mourir. Cette simplification à l’extrême est certes adaptée à un public jeunesse mais manque quelque peu de réalisme. Cependant, on ne peut accuser les personnages de Bottero de manquer de profondeur : ils ont parfois des émotions contradictoires et des dilemmes à résoudre, leurs sentiments sembleront seulement plus purs, plus intenses que ce qu’ils devraient être afin de donner un exemple plus simple et clair à suivre. De plus, la trop grande facilité des personnages de cette première trilogie est complexifiée dans la seconde trilogie : l’auteur jugeait peut-être avoir alors à faire à un public plus mature, en tout cas les questions du bien et du mal sont revues grâce à la relation entre les personnages d’Éléa Ril’ Morienval et d’Altan Gil’Sayan mais également grâce au personnage très ambivalent qu’est le jeune Illian – mais je n’en dirai pas plus, je vous laisse découvrir par vous-même ou attendre le prochain article !
Voici donc mon avis sur la trilogie La Quête d’Ewilan de Pierre Bottero ; j’attends, comme toujours, vos réactions et opinions en tout genre – que vous ayez aimé ou non, il est toujours intéressant d’en discuter ! – et je vous promets une suite sur la seconde trilogie, Les Mondes d’Ewilan, mais « ceci est une autre histoire, qui sera contée une autre fois » nous a sagement écrit un jour Michael Ende alors je vous dis à très bientôt.
J’ai bien aimé ton article mais je ne connais pas du tout cette trilogie. Au plaisir d’en apprendre davantage dans ton prochain billet!
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Il sera en ligne dès mercredi prochain 🙂
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Je n’ai jamais lu l’auteur mais j’aimerai beaucoup lire cette trilogie dont j’entends beaucoup de bien =)
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C’est simple, doux et poétique : il faut vraiment y aller dans l’optique de s’évader et se souvenir que c’est de la littérature jeunesse^^
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J’ai toujours été intriguée par ces romans, mais les illustrations de la couverture m’ont toujours un peu rebutée…
Merci pour ton article, c’est très intéressant 🙂
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Autant je déteste les versions poches, autant j’adore les couvertures des grands formats – mais ça doit être mon trop grand attachement au texte qui parle ! :p
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Je les ai dans ma pal depuis longtemps (qqun me les a offert, mais je ne me souviens même plus qui…L’ingrate !) et je ne les ai toujours pas lu ! J’ai l’impression que je vais les commencer bientôt, ça me semble être une bonne lecture pour cette période de l’année ^^ Et ton billet est tellement dithyrambique !!
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J’ai toujours plutôt associé ces livres aux périodes estivales – peut-être parce que je visualise toujours Gwendalavir comme un pays très ensoleillé :p – mais ce n’est pas une mauvaise idée comme lecture de fête, on reste dans la légèreté et la poésie !
J’espère qu’il te plaira en tout cas ; je ne suis pas certaine qu’il me plairait si j’en faisais une première lecture aujourd’hui… Il faut voir^^
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Ah ? Oh on verra, je suis assez bon public et j’aime bien la jeunesse ! A suivre 😉
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J’ai l’impression que ces livres ont toujours fait partis de ma bibliothèque, voilà bien des années que je les ai lu. Mais je sais que je les avait adoré etje pense me laisser tenter par une relecture avant de les chroniquer 😀
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ça me semble une bonne idée : comme un petit bonbon oublié dont on retrouverait la saveur après des années ! :3
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Ouai mais le bonbon qui traîne depuis des années je me risquerais pas à le manger :p
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Soit xD
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Je te le donne si tu veux ce fameux bonbon 😛 Fait attention j’ai un gros chien qui perd beaucoup beaucoup beaucoup de poils 😛
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Je pensais plutôt à un bonbon neuf mais d’une marque qu’on n’a plus mangé depuis longtemps, genre si on s’achète un paquet d’Harlequins alors qu’on n’en a plus mangé depuis la primaire parce que là, ton bonbon, il me fait un peu peur ! J’suis déjà assez allergique aux poils de mon propre chien pour ne pas en rajouter xD
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J’avais compris tant fais pas je te taquinais ; ) !! Je vois ce que tu veux dire 😀 allergique ? Ouf dur je te plains
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Wahou, très complet cet article !
Je n’ai lu que le premier tome pour le moment mais j’ai beaucoup aimé, j’ai la suite avec moi je la lirai certainement en début d’année 🙂
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Une bonne façon de commencer l’année ! :p
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Cela fait un petit moment que j’ai envie de découvrir cette saga ! J’en entends beaucoup de bien, et je pense que ça pourrait énormément me plaire !
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J’espère que tu auras l’occasion de t’y mettre ! 🙂 Après, il faut juste être prêt à accepter le côté très jeunesse^^
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J’ai lu cette saga il y a longtemps mais j’ai le vif souvenir de l’avoir adoré!! J’avais aimé l’univers dans lequel j’étais rentré sans difficulté et les personnages vraiment attachants!! Je l’avais recommandé à toutes mes amies! ^^
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Je lis les livres de Bottero avec mon frère. On est au deuxième tome des mondes d’Ewilan. J’aime bien cette série mais dans le premier tomes les explications de Duom pour Camille n’étaient pas bien insérées, on sentait qu’elles étaient là juste pour que le lecteur comprenne. Sinon c’est aussi le style auquel je n’adhère pas trop.
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J’aime tellement Bottero, et les deux trilogies d’Ewilan sont géniales ! Mais ma préférée reste Le Pacte des Marchombres 🙂
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Ahah ! Je constate que beaucoup de gens préfèrent Le Pacte des Marchombres mais pour moi, les 2 trilogies d’Ewilan restent n°1. Je crois que mon attachement au groupe est trop grand^^
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Je comprends !
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