Découvrons…Nekromantia 1, de Rose Berryl

     Aujourd’hui, chers lecteurs, je vous propose de parler d’une nouveauté que j’ai pu découvrir grâce à mon partenaire, CKR Éditions – que je remercie chaudement au passage. Il s’agit du premier épisode de Nekromantia, intitulé Le Bouclier magique. Avant même de commencer cette lecture, j’ai été interpellée par la dédicace de l’auteure : « Je dédie cette série à ceux et celles qui ont su conserver leur âme d’enfant » ; celle-ci m’a beaucoup plu et autant vous dire que j’espérais grandement que cet épisode tiendrait sa promesse en charmant l’âme d’enfant qui ne m’a jamais quittée. Cependant, cette dédicace m’a finalement parue bien étrange dans un ouvrage de dark fantasy qui prend donc place dans un univers sombre peuplé d’ombres et de démons – ou alors, il faut avoir eu une enfance bercée par les récits de Lovecraft à l’heure du coucher !


Ce premier épisode s’ouvre in medias res, par un combat entre Mylvera, chevalière défenseure de Belnigera, contre un démon tentaculaire venu déranger l’ordre du royaume en tentant de s’y infiltrer grâce à des failles dans ce fameux Bouclier magique censé les retenir. Cet épisode n’est pas extrêmement innovant pour de la fantasy, on a affaire à des motifs traités de façon très classique pour le genre mais l’univers créé est intéressant et on se laisse plutôt bien emporter par l’histoire qui ne manque certainement pas d’action et nous entraîne très vite dans les profondes noirceurs qui troublent la paix du royaume.

Ligne horizontale        Manichéisme & traditions.

       Dans cet épisode, le bien et le mal sont représentés de manière très tranchée, très manichéenne, et sont immédiatement identifiables. En effet, on a, d’un côté, Mylvera qui se pose en défenseure de l’ordre, tandis qu’on a, de l’autre côté, le démon qui vient semer le chaos. Les deux forces en présence sont même séparées par une frontière bien distincte : le Bouclier magique. Il n’y a donc pas de confusion possible, le combat fait immédiatement rage entre la représentante des royaumes humains, symbole du Bien, toujours inondée de lumière et rejointe par des alliés amicaux, et les créatures des ténèbres, personnification du Mal, se cachant dans l’ombre et se servant d’alliés comme d’outils. Cette distinction manque peut-être un peu de subtilité, néanmoins elle place ainsi l’histoire dans un contexte bien défini puisque nous pouvons dès lors constater que le sujet de l’histoire est haut ; il s’agit bel et bien du destin de l’univers qui se trouve placé entre les mains de Mylvera, figure héroïque s’il en est. Jeune, vivace, courageuse, ne manquant ni de répartie, ni d’alliés puissants, maniant aussi bien l’arc que l’épée Mylvera est bien un héros dans toute sa splendeur, rappelant presque à notre souvenir les grandes légendes guerrières des épopées médiévales. Cependant, cet aspect simplificateur exclut en grande partie toute la complexité du réel, réduisant le point de vue à deux angles opposés et réduisant la proportion de réalisme de l’œuvre, nous ramenant plutôt vers un modèle d’héroïc fantasy très classique et peu nuancé.

    Par ailleurs, outre l’image de hentaï que cela suscitera inévitablement dans de nombreux esprits, le fait que le démon qu’affronte Mylvera se voit doté de tentacules ne me paraît pas anecdotique. En effet, les tentacules, apanages du monstre marin, sont intimement liées à la notion de danger et nous font immédiatement percevoir le risque que court Mylvera. On en voit l’exemple dans le personnage d’Ursula dans l’histoire, version Disney ou version originale, de La Petite Sirène mais également dans celui du démon qui tente d’envahir Gwendalavir dans la trilogie Les Mondes d’Ewilan de Pierre Bottero et, plus encore, on pensera au fameux monstre tentaculaire irreprésentable qu’est Cthulhu dans la nouvelle de Lovecraft L’Appel de Cthulhu. Le motif est donc loin d’être nouveau dans les littératures de l’imaginaire et fait écho à tout un imaginaire collectif pour les lecteurs assidus du genre qu’il est très intéressant de retrouver. De même, le fait que l’héroïne soit féminine tranche avec toute une tradition littéraire classique qui n’usait d’héroïnes féminines que pour leurs envolées romantiques et s’associe avec une tradition plus développée en fantasy qui permet aux héroïnes du genre de s’émanciper de cette image réductrice pour leur permettre d’être de véritables guerrières comparables en force et en courage à tout autre personnage masculin. Il est donc très agréable de retrouver ici des thèmes inhérent à la fantasy rompant avec une littérature trop classique : la promesse d’évasion faite par les littératures de l’imaginaire est bien tenue, nous laissant entrevoir un univers complexe et sans morosité.

Ligne horizontale    En bref :

    Ce fut une lecture très agréable, rapide – une petite soirée m’a suffit pour dévorer ce premier épisode devant un bon dîner – et que je recommande volontiers à ceux qui veulent commencer en fantasy. En effet, on n’y est pas perdu puisqu’on retrouve un schéma assez classique de l’affrontement entre le Bien et le Mal – même si j’attends la suite pour voir si, éventuellement, les choses se complexifient pour le personnage de Mylvera dont on ne connaît encore que très peu de choses – et la prise de parti est donc très rapide. Cependant, un habitué de la fantasy qui rechercherait des textes innovants pourrait être un peu déçu par ce premier épisode qui n’apporte rien de très nouveau au genre. Mais, comme nous n’avons cessé de le rappeler : ceci n’est qu’un premier épisode, qui remplit très bien son office de mise en place de l’intrigue et qui nous introduit très rapidement des personnages qui seront sans doute importants par la suite – je suis notamment très intriguée par Zohariel, une jeune scribe s’intéressant de près aux pouvoirs druidiques – et je suis persuadée que le développement ultérieur devrait pouvoir nous apporter un peu plus de cette originalité qui a fait défaut ici, car ce début n’en avait sans doute juste pas encore le temps. J’attends donc impatiemment la suite !

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